11 mars 2020, Galerie du Centre de Spiritualité de Regnum Christi, Paris
Le 11 mars 2020, à l’occasion de la sortie de son deuxième livre, Claire de Saint-Lager m’a invitée à exposer mes toiles. Chaque tableau est entré en résonance avec son texte lu par la comédienne Clémence de Vimal… Un livre qui parle d’attente et d’espérance dans la douloureuse expérience du célibat qui se prolonge. Un livre qui parle de l’alliance, celle que Dieu tisse avec chacun de nous, celle qu’il nous invite à vivre avec nous-mêmes, celle que vivent l’homme et la femme dans la mystérieuse aventure du mariage. Telles “des colonnes sculptées », Dieu nous façonne et nous affine, dans le creux, le manque et l’attente… pour nous rendre capables de vivre pleinement le don et la réceptivité. Il veut combler celui, celle qu’Il aime.
“Nos fils comme des plantes qui croissent dans leur jeunesse. Nos filles comme des colonnes sculptées qui font l’ornement des palais.” (Ps 143).
Ce fut un honneur pour moi d’avoir quelques unes de mes toiles embellies et transcendées par les textes de cette écrivaine et conférencière remarquable.

“Le solitaire en fait souvent l’expérience. […] des anges de consolation envoyés par le Christ” COMMES DES COLONNES SCULPTÉES, p 109
“Le solitaire en fait souvent l’expérience. Personne n’a la réponse pour lui, personne ne peut vivre à sa place, ressentir ce qu’il ressent, accéder à l’absolu de son désir. Il y a néanmoins des présences qui sont de véritables baumes : celles qui pleurent avec vous sans vous entraîner dans le désespoir, celles qui contemplent votre courage à demeurer, celles qui témoignent de leur espérance et de leur foi, celles qui aiment et restent près de vous quand le chagrin vous étrangle. Il y a des présences qui voient votre lumière quand vous êtes enfoncés dans vos ténèbres. Il y a ces présences patientes face au rythme lent du deuil, celles qui éveillent vos forces vives. Il y a des présences douces qui savent rester à la porte de votre cœur, le voir saigner tout en y décelant la beauté. Il y a des présences qui vous enseignent ce qu’est la véritable compassion. Toutes ces présences sont comme des anges de consolation envoyés par l’amour divin. ”

“L’alliance que le couple est appelé à refléter […] Notre âme soupire après ce qui dure” COMMES DES COLONNES SCULPTÉES, p 30-31
“L’alliance que le couple est appelé à refléter n’est pas un serment léger emporté par le vent des sentiments fragiles. « Un mariage ne se contracte pas. Il se danse. » (Christiane Singer) L’alliance est un ballet, c’est le mouvement de la rencontre, où l’on invite l’autre à suivre nos pas et où l’on s’abandonne aux siens, créant et recréant au gré des notes une chorégraphie indicible. L’alliance est une danse où l’on ne sait pas toujours si l’on est attendu ou rejoint. Cette danse est parfois faite de moments de reculs, de timidité, de dissonance mais aussi de retrouvailles, de fièvre, de passion, et encore d’intimité, de trêve et de secret. Aucun mariage ne se ressemble. L’alliance se tisse sur le fil de nos natures singulières.
Je crois que si Jésus manifeste son premier signe à l’occasion de noces, c’est parce qu’il vient rencontrer notre désir. Il le connaît intimement. Il connaît notre soif de vivre, notre soif d’ivresse, de joie, notre soif que le vin coule à flot, que la fête dure, que la promesse soit éternelle. Il sait que nous ne rêvons pas de contrats, de règles ni de morale, mais d’amour, de rencontre, de mystère, de fièvre et de douceur. Nous avons soif de vivre, d’une vie en abondance, d’une mesure pleine et débordante. Notre âme soupire après ce qui dure.”

“Le long célibat défie un monde qui ne sait plus vivre la longue attente. Il défie la logique d’un monde où il est urgent de s’établir et de se sécuriser, quitte à vivre des relations médiocres, bien loin de la communion à laquelle nous sommes appelés.” COMME DES COLONNES SCULPTÉES p 79-80
« Aller trop vite, c’est parfois ne pas assez faire confiance » disait mère Isabelle, religieuse clarisse, à une femme qu’elle accompagnait. « Lorsqu’il y a un manque, ne le comblez pas trop vite. Laissez ce vide et Dieu s’en occupera. Laissez le temps gratuit. Dieu seul sait et tout est grâce. » L’attente, comme le dit si bien saint Augustin, étend le désir, en étendant le désir, étend l’âme et en étendant l’âme la rend capable de recevoir la surabondance. L’attente pacifie notre rapport au temps. Si l’attente est toujours vécue comme une impatience, dans l’angoisse de manquer et de s’établir, elle empêche de goûter le présent, de l’investir.”
“L’espérance dans l’attente nous défait de notre tentation de maîtriser le temps […] Le temps des amours aurait dû venir au printemps, comme dans la nature.” COMMES DES COLONNES SCULPTÉES p 140
“L’espérance dans l’attente nous défait de notre tentation de maîtriser le temps. Et ce n’est jamais évident, surtout lorsque nous voyons les mois et les années passer. Il nous arrive de penser qu’il aurait été bon que l’objet de notre attente arrive à un moment précis, quand nous étions jeunes, dynamiques, que notre peau était fraîche et notre joie primesautière. Le temps des amours aurait dû venir au printemps, comme dans la nature !”
“Le frère Christian de Chergé […] avant de recevoir le bien que Dieu veut nous donner” COMME DES COLONNES SCULPTÉES 141-142
“Le frère Christian de Chergé, martyr de Tibhirine, explique l’espérance ainsi : « L’avenir n’appartient qu’à Dieu. La patience, c’est la vertu de de l’espérance, et il ne peut y avoir de l’espérance que si l’on accepte de ne pas voir. Vouloir voir ou imaginer l’avenir, c’est faire de l’espérance-fiction, et il me semble que c’est d’une certaine façon la violer. » J’ai souvent remarqué qu’avant qu’un grand bien nous soit donné, nous étions souvent invités à un grand renoncement. Comme s’il fallait faire le vide – de tout ce qui est trop tinté de notre volonté – avant de recevoir le bien que Dieu veut nous donner”.

Le cantique des cantiques de Claire de Saint-Lager : “Tu m’as séduite et je me suis laissée séduire […] Et la voici qui revient des lieux arides, Appuyée sur son Bien-Aimé” COMMES DES COLONNES SCULPTÉES p. 22-23
« Tu m’as séduite,
Et je me suis laissée séduire, Tu m’as maîtrisée,
Tu as été le plus fort » (Jr 20,7).
Tu m’as conduite à l’écart
Au désert des amours humains Comme la fiancée,
La colombe au creux des rochers
La Sulamite du cantique
Au souffle coupé
La gorge serrée
J’ai cherché dans la nuit
Celui que j’espérais
« Avez-vous vu celui que mon cœur aime ? » J’ai découvert alors
Que nul ne peut éveiller l’Amour
Avant l’heure de son plaisir
La Sagesse de l’Éternel
Est mère du bel Amour,
Dans le désert,
Il parle au cœur,
Il saisit sa Toute Belle,
Et la voici qui revient des lieux arides, Appuyée sur son Bien-Aimé







